Mai 2025Philippe Berton, inspecteur de l’Éducation nationale Économie-Gestion de l’Académie de Poitiers, a piloté le groupe de travail [1] chargé d’élaborer le nouveau Certificat de spécialisation « Desserts de restaurant ». Il revient sur les enjeux de ce diplôme qui remplace la Mention complémentaire « Cuisinier en desserts de restaurant ».
Depuis le 1er janvier 2025, l’intitulé « Certificat de spécialisation » remplace celui de « Mention complémentaire » dans toutes les filières de l’Éducation nationale. Le Certificat de spécialisation « Desserts de restaurant » (CSDR) est un diplôme de niveau 3 qui sanctionne une formation complémentaire d’un an accessible après l’obtention d’un premier diplôme des métiers de la cuisine et de la pâtisserie de niveau 3 (CAP), de niveau 4 (bac ou brevet professionnel) ou de niveau 5 (BTS). Ce certificat rénové sera mis en place à la rentrée 2025 au sein des établissements qui le proposent (liste disponible sur le site de l’Onisep).
Pourquoi cette formation a-t-elle fait l’objet d’une réforme ?
Depuis 2018, la loi impose que la totalité des diplômes soient revisités tous les cinq ans afin de s’assurer qu’ils restent adaptés aux besoins du marché et des employeurs. En ce qui concerne le
Certificat de spécialisation « Desserts de restaurant », il s’agit d’une rénovation en profondeur répondant à une forte demande exprimée par les acteurs de la filière
Hôtellerie-Restauration. En effet, ce référentiel âgé de plus de quinze ans se devait de mieux prendre en compte les
changements que les entreprises du secteur de la restauration doivent intégrer dans de multiples domaines : diversification des modes et concepts de restauration, évolutions technologiques et économiques, préoccupations environnementales, ouverture à l’international...
Comment ce travail a-t-il été conduit ?
La « fabrication » d’un
diplôme est une démarche collaborative qui se fait avec les professionnels, sous la tutelle du
ministère de l’Éducation nationale. Notre groupe de travail était donc composé de professeurs spécialisés et de formateurs en pâtisserie, de chefs pâtissiers, de représentants des syndicats professionnels (
UMIH,
GHR), ainsi que de l’organisateur délégué du
Championnat de France du Dessert [2] car ce concours est un partenaire historique de la
formation professionnelle des pâtissiers de restaurant.
Quelles évolutions significatives ont-elles été apportées ?
Le référentiel « Desserts de restaurant » est une création de la filière Hôtellerie-Restauration dont il est une formation phare. C’est le certificat de spécialisation qui attire le plus d’élèves et apprentis. Environ
1 200 jeunes sont en formation chaque année et 75 % d’entre-eux sont en emploi à l’issue des douze mois de formation. La grande majorité des élèves qui préparent ce diplôme sont détenteurs d’un bac pro « Cuisine », voire d’un BTS « Management en Hôtellerie-Restauration ».
A contrario, la majorité des apprentis sont détenteurs d’un CAP « Cuisine ». Aujourd’hui, la rénovation du certificat confirme cette volonté d’élargir au maximum le vivier de recrutement. D’une part, le diplôme reste accessible aux deux formations initiales –
formation scolaire (lycées hôteliers) et
apprentissage (CFA) – et cela à plusieurs niveaux, depuis le bac pro ou brevet professionnel jusqu’au BTS, et depuis le CAP.
De plus, nous avons décloisonné les univers de la
cuisine et de la
pâtisserie. En effet, jusqu’à, présent un jeune titulaire d’un CAP pâtisserie ou d’un bac pro boulangerie-pâtisserie devait demander une dérogation pour accéder à l’ex-Mention complémentaire « Cuisinier en desserts de restaurant ». (
Voir à ce sujet notre article « Comment devient-on pâtissier », ndlr) C’est une importante nouveauté, et vous comprenez pourquoi le mot « cuisinier » a été volontairement supprimé de l’intitulé. Enfin, cet intitulé permet de bien distinguer la spécialisation «
Desserts de restaurant » de la spécialisation «
Pâtisserie de boutique » et de mettre l’accent sur sa finalité : la maîtrise du
dessert à l’assiette !
Qu’en est-il des contenus ?
La description du métier ne se limite plus au restaurant et intègre d’autres univers dans lesquels le jeune pourra exercer, par exemple les salons de thé. Les gestes et produits de base restent les mêmes, mais nous avons introduit des éléments nouveaux. Les
alternatives végétales (utilisation des herbes, légumes...), les attentes spécifiques (sans gluten), les tendances de consommation, notamment l’utilisation raisonnée de l’ingrédient fondamental qu’est le
sucre, et l’
éco-responsabilité : zéro déchets, saisonnalité, origine des produits, circuits courts... D’autres nouveautés ont été mises au programme : la spécificité de l’
envoi en restauration, la gestion du stress et du coup de feu ou encore la prise en compte d’une commande spécifique de dernière minute (suppression d’un ingrédient, présentation personnalisée pour un anniversaire...). Ces situations sont mises en pratique dans les épreuves finales du diplôme.
Le Championnat de France du Dessert fait aussi une place à des compétences autres que techniques...
Effectivement, le « dessert panier » est une épreuve basée sur la capacité d’adaptation [3], l’exécution chronométrée sous le regard du jury de travail est un contexte de stress à maîtriser, la présentation du dessert au jury de dégustation fait appel à la dimension commerciale du métier... Mais les synergies entre le
Championnat de France du Dessert et le Certificat de spécialisation « Desserts de restaurant » ne s’arrêtent pas là. Ce
partenariat avec l’Éducation nationale existe depuis 1974 et nous entendons bien qu’il perdure. J’ai assisté pour la première fois, cette année, à une finale nationale [4]. C’est un travail d’organisation et de précision formidable, depuis l’accueil des candidats jusqu’à la composition des jurys où sont présents les
lauréats N-1, ce qui me semble une excellente initiative. J’ai aussi pu mesurer l’
implication des établissements qui, à l’image du Lycée des Métiers Louis Guilloux de Rennes, se préparent toute l’année à accueillir le concours pour lui offrir des conditions à la hauteur du
niveau d’excellence. Il existe moult concours dans l’hôtellerie-restauration, dont le
Concours général des métiers, qui créent de l’émulation et permettent de repérer des talents. Le Championnat de France du Dessert est incontestablement le concours de référence pour les jeunes qui prennent la voie du dessert de restaurant.
[1] Sous l’autorité de Michel Lugnier, administrateur de l’État, inspecteur général de l’Éducation nationale groupe Économie-Gestion en charge des filières Hôtellerie-Restauration et Tourisme.
[2] Le Championnat de France du Dessert est organisé chaque année depuis sa création par Cultures Sucre qui en délègue la mission opérationnelle à son partenaire spécialisé,
ab3c.
[3] Liste d’ingrédients, technique imposée et thème présentés au candidat juste avant l’épreuve pour réaliser un des deux desserts.
[4] Les 2 et 3 avril 2025 au Lycée des Métiers Louis Guilloux, à Rennes, sous la présidence du chef doublement étoilé Franck Putelat.
Consultez ici le palmarès.