Février 2025
Bien que des débats scientifiques persistent sur la validité scientifique du concept « d’addiction à l’alimentation » (voir notre article à ce sujet), des outils de mesure ont été mis au point pour évaluer la présence de comportement alimentaire de type addictif chez certains individus.
L’échelle de Yale (YFAS) est l’outil le plus largement utilisé pour cela, mais quelle est sa fiabilité ? Pour le savoir, une équipe a entrepris une analyse des études ayant eu recours à la YFAS (dans sa version originale ou sa version revue 2.0) à travers le monde. La recherche dans 30 bases de données a permis d’inclure 65 études, sur des échantillons allant de 25 à près de 10 000 sujets. À partir des coefficients rapportés dans chaque étude individuelle, les chercheurs ont calculé les coefficients moyens de fiabilité interne [1] et de stabilité des mesures (test/retest), qu’ils ont jugés satisfaisants, suggérant la bonne capacité de la YFAS à détecter des troubles alimentaires de type addictif. Les chercheurs soulignent toutefois les précautions à prendre lors d’une utilisation dans un contexte clinique.
Si la YFAS peut éclairer le regard des cliniciens sur les difficultés rencontrées par les patients, elle devrait être interprétée aux côtés d’autres mesures évaluant le comportement alimentaire et la santé globale (physique et mentale), afin d’obtenir un portrait clinique complet. En effet, les comportements alimentaires de type addictif sont souvent associés à d’autres troubles de la régulation des comportements et des consommations tels que l’alimentation émotionnelle (manger sous le coup des émotions), les troubles liés à l’usage de substances (alcool, tabac, cannabis), ainsi qu’à l’obésité.
En outre, certaines catégories de patients tels que ceux subissant une chirurgie bariatrique pourraient obtenir des scores biaisés sur l’échelle YFAS, du fait des restrictions alimentaires mises en place avant la chirurgie puis des changements physiologiques induits par l’opération, à même de modifier les sensations de faim et les envies irrépressibles (cravings) parfois expérimentées. Ainsi, l’évaluation de la YFAS méritera d’être poursuivie et approfondie dans différents contextes et pour différentes applications cliniques.
[1] Chaque étude incluse rapporte un coefficient rendant compte de la fiabilité interne de l’échelle utilisée, qui mesure la cohérence des différents items du questionnaire afin de vérifier qu’ils contribuent bien à mesurer la même notion.