Le goût sucré : Fausses croyances, vraies découvertes et pistes à explorer

Le goût sucré : Fausses croyances, vraies découvertes et pistes à explorer

Octobre 2021

Une longue revue parue à l’été 2021 s’est attelée à faire le point sur les connaissances acquises sur les mécanismes impliqués dans la perception de la saveur sucrée, et à remettre en question certaines théories. À commencer par l’idée courante selon laquelle le sucré, l’amer, l’acide, le salé et l’umami, seraient détectés par des zones distinctes de la langue (le salé sur l’avant, l’acide sur les bords latéraux…). En réalité, chaque saveur peut être perçue sur chaque partie de la langue, mais avec des seuils de détection différents.

La découverte du récepteur du goût sucré

Pour ce qui concerne plus particulièrement la saveur sucrée, ce n’est qu’au début des années 2000 qu’il a été montré que sa détection reposait sur un récepteur couplé aux protéines G formé de deux sous-unités (T1R2 et T1R3), dont l’une s’avère commune aux sous-unités du récepteur détectant l’umami (sous-unités T1R1 et T1R3). Les sucres tels que les monosaccharides (comme le glucose) ou les disaccharides (comme le saccharose) activent ce récepteur du goût sucré, mais ils ne sont pas les seuls : des acides aminés, protéines et édulcorants non caloriques peuvent également se lier à différents domaines de T1R2/T1R3. En revanche, on ne sait pas encore si des glucides comme l'amidon sont également capables d'activer le récepteur du goût sucré. D’ailleurs, l’étude des voies de signalisation du goût sucré dans les cellules gustatives doit se poursuivre, car de nombreuses questions restent ouvertes, avec des implications sur le comportement alimentaire.

La piste des voies alternatives

Après la découverte du récepteur du goût sucré, on a supposé que la saveur des sucres et des édulcorants non caloriques était presque exclusivement transmis par T1R2/T1R3. Pour autant, les auteurs de cette revue envisagent l’existence de voies alternatives de détection et de signalisation. Ainsi, les cellules gastro-intestinales (absorption de glucose) et pancréatiques (libération d'insuline) utilisent des mécanismes spécialisés pour détecter et absorber le glucose, à savoir des transporteurs et symporteurs [1] de glucose. Compte tenu des similitudes entre les papilles gustatives et l'épithélium du système gastro-intestinal, les auteurs explorent ainsi la possibilité que les transporteurs de glucose puissent être responsables d’une voie alternative de détection des sucres, sans doute minoritaire. A noter que des voies alternatives pour les édulcorants sont envisageables. Mais les données actuelles ne permettent pas de trancher la question, bien qu’une réponse s’avère nécessaire pour interpréter et prédire leurs effets physiologiques.

Des interactions entre les systèmes gustatif et intestinal

Par ailleurs, il a récemment été proposé que l'attirance pour les sucres puisse ne pas être seulement liée à la perception consciente de la saveur sucrée, mais aussi à la détection viscérale des sucres. Il existerait d’ailleurs une interaction entre la perception orale de la saveur sucrée et les signaux homéostatiques viscéraux : des hormones intestinales et des neuropeptides (GLP-1, leptine et endocannabinoïdes) ont été identifiés dans les bourgeons gustatifs et il a été démontré qu'ils y modulent l'activité des cellules et les réponses aux composés sucrés.

Sucre et cerveau

L’attirance pour la saveur sucrée et la consommation de sucres seraient contrôlées non seulement par le système gustatif et le système intestinal, mais aussi par le cerveau, qui détecte le sucre directement (glucose circulant au niveau cérébral) et/ou indirectement (par le biais des perceptions orales et intestinales). Des voies spécifiques et indépendantes semblent réguler notre attirance pour les sucres d'une part, et la quantité de sucres consommée d'autre part. Ainsi, les valeurs sensorielles (+/- sucré), hédoniques (j’aime +/-) et métaboliques (+/- calorique) des signaux induits par les sucres seraient codées par des circuits cérébraux distincts fonctionnant en parallèle : l’attirance pour les sucres ne semble pas dépendre de leur teneur calorique ni des récepteurs du goût sucré. Ce sont davantage des mécanismes extra-oraux qui contrôleraient la consommation de sucres et participeraient à l’établissement d’une préférence à long terme.

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Le récepteur de la saveur sucrée, d’abord mis en évidence au niveau de la langue, contribue également à la détection des sucres dans de nombreux tissus extra-oraux comme l'œsophage, l'estomac, le foie, le pancréas, l'intestin, la vessie, le testicule, les muscles squelettiques, les voies respiratoires et le tissu adipeux. Son activation conduit à la stimulation de certaines zones cérébrales comme l’insula, elle-même en interaction avec les aires impliquées dans la récompense, la motivation et l’homéostasie énergétique.



[1]  Protéine permettant le transport de molécules dans le même sens à travers la membrane cellulaire.

Liens d’intérêt: 2 auteurs employés par Brain-Biotech.

A retenir

  • Contrairement aux idées reçues, il n’existe pas de zones spécialisées de la langue propres à chaque saveur : chaque saveur peut être perçue sur chaque partie de la langue, à des seuils de détection différents.
  • La découverte du récepteur de la saveur sucrée remonte au début des années 2000. Il serait activé par les mono- et disaccharides mais aussi des acides aminés, protéines et édulcorants non caloriques.
  • Outre ce récepteur, il pourrait exister des voies alternatives post-orales (digestives notamment) de détection et de signalisation des composés sucrés.
  • L’attirance pour la saveur sucrée et la consommation de sucres seraient régulées au moins à trois niveaux : système gustatif, viscéral et central.
  • Le contrôle de la consommation de sucres et l’établissement d’une préférence à long terme reposeraient avant tout sur des mécanismes post-oraux, et non sur la teneur calorique ou les récepteurs du goût sucré.

Sources

  • Sweet Taste Is Complex: Signaling Cascades and Circuits Involved in Sweet Sensation. von Molitor E, Riedel K, Krohn M, Hafner M, Rudolf R, Cesetti T. Front Hum Neurosci. 2021;15:667709.
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