Octobre 2024
Dans une revue de la littérature publiée dans l’European Heart Journal, des chercheurs ont rassemblé les données démontrant les bienfaits de l’activité physique sur la santé cardiovasculaire, en prévention primaire et secondaire, tout en détaillant les différents mécanismes physiologiques impliqués.
Prévention primaire
Une activité physique régulière est associée à une diminution du risque cardiovasculaire et de la mortalité toutes causes confondues, avec un effet d’autant plus important que le niveau d’activité physique est élevé. Si ces bénéfices sont observés pour les activités d’endurance et de résistance (= renforcement musculaire), c’est la combinaison des deux qui semble la plus efficace. Une activité physique régulière permet également d’améliorer la capacité cardiorespiratoire, inversement corrélée au risque cardiovasculaire, même si celle-ci a une composante héréditaire.
Toutefois, on peut se demander s’il y a un risque à faire trop d’exercice. Si la question demeure controversée, aucune preuve d'un risque accru de mortalité cardiovasculaire n’a été constatée chez les anciens athlètes de haut niveau. De même, des niveaux très élevés d'activité physique de loisir ne semblent pas augmenter le risque de pathologies ou d’évènements cardiovasculaires chez les adultes en bonne santé. Toutefois, des niveaux élevés d’activité physique liée à l'emploi pourraient être associés à davantage d'événements cardiovasculaires, peut-être en raison des efforts de longue durée (> 8 h) sans récupération suffisante.
Prévention secondaire
Chez les patients souffrant de pathologies cardiovasculaires, les recommandations actuelles prônent un mode de vie actif, avec des conseils d’activité physique similaires à ceux donnés aux personnes en bonne santé [1], bien qu'une certaine prudence s'impose (voir paragraphe suivant). Suite à la survenue de telles pathologies, le maintien (ou l’adoption) d’une activité physique est associé à une réduction significative des maladies cardiovasculaires ultérieures (- 50 %) et de la mortalité toutes causes (- 45 %), par rapport à une absence d’activité.
Par ailleurs, dans la réadaptation cardiovasculaire [2], si l’activité d’endurance d'intensité modérée et l’entrainement de résistance (renforcement musculaire) sont bénéfiques, la combinaison des deux semble là-encore la plus efficace pour améliorer la capacité cardiorespiratoire, la composition corporelle et la force musculaire. La personnalisation des programmes d’entrainement est toutefois importante. Une évaluation de la VO2max [3] devrait être recommandée pour déterminer les modalités d'entraînement adaptées (type d’activité, intensité, fréquence…). L’activité physique, en particulier d'intensité élevée, peut être contre-indiquée dans certaines situations (arythmie incontrôlée, semaine suivant un accident cardiovasculaire, etc.).
Métabolisme, inflammation, santé vasculaire… des mécanismes divers
Les bienfaits de l'exercice physique sur la santé cardiovasculaire font intervenir un ensemble de molécules de signalisation, dites exerkines, libérées en réponse à un exercice aigu et/ou chronique. Ces molécules, telles que des métabolites produits au cours de l’exercice (ex. lactate), hormones, protéines/peptides (ex. cytokines), acides nucléiques ou radicaux libres (ex. NO-), exercent leurs effets sur de multiples systèmes organiques (notamment le système cardiovasculaire : muscle cardiaque, vaisseaux) par des voies endocrines, paracrines et/ou autocrines.
L’activité physique permet par ailleurs d’améliorer le profil lipidique et de réduire la glycémie, tous deux associés au risque cardiovasculaire. Même si une activité physique intense aigüe peut augmenter les marqueurs inflammatoires, une activité régulière, même d’intensité élevée, atténue l’inflammation chronique systémique. Enfin la pratique régulière d’une activité, en particulier d’endurance, favorise les processus de maintien et de réparation cellulaire, qui tendent à diminuer avec l’âge et en cas de maladie cardiovasculaire.
Un exercice d'endurance régulier contribue également à maintenir l'intégrité des cellules endothéliales (qui tapissent l’intérieur des vaisseaux), dont les fonctions (barrière sélective, inhibition de la formation de caillots, régulation du tonus vasculaire, etc.) sont altérées chez les personnes atteintes ou à risque de pathologies cardiovasculaires. Les activités d’endurance et de résistance, seules ou combinées, améliorent les fonctions endothéliales, notamment la fonction de barrière, limitant l’accumulation de lipides dans la paroi vasculaire sous-endothéliale. De plus, l'exercice physique semble stabiliser les plaques d'athérosclérose indépendamment des modifications des profils lipidiques sériques. L'exercice physique améliore aussi le diamètre et la capacité de dilatation des artères coronaires, et atténue l'augmentation de la rigidité vasculaire liée à l'âge.
Enfin, l'exercice physique présente un intérêt après un infarctus, en améliorant la capacité de régénération du myocarde, en particulier lorsque l'entraînement physique commence tôt (environ 1 semaine) après l'événement. La protection contre les arythmies potentiellement mortelles est un autre effet bénéfique de l'exercice physique régulier.
[1] Selon les recommandations de l’OMS : au moins 150 min par semaine d’activités modérées + renforcement musculaire 2 fois/semaine.
[2] Ensemble des activités nécessaires pour influencer favorablement le processus évolutif de la maladie (activité physique, éducation, etc.)
[3] Volume maximal d’oxygène que l’organisme peut utiliser par unité de temps, qui représente la capacité cardiorespiratoire de l’individu.
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