juillet 2020
Le terme « addiction » s’est banalisé dans le langage courant. Il n’est pas rare d’entendre certaines personnes se définir comme accros au portable, au travail, au sport… Non seulement ce concept ne fait pas consensus dans la communauté scientifique, mais en plus nous avons tendance à confondre addiction, attirance, préférence et compulsion. Comprendre les mécanismes de notre cerveau liés à ces comportements permet d’y voir plus clair !
Une addiction au fait de manger, plutôt qu’à l’aliment lui-même
Au départ, tout repose sur la sensation de plaisir et de bien-être associée au circuit de la récompense. Lorsque nous mangeons un aliment sucré, le cerveau reçoit un messager chimique appelé dopamine qui lui dit « ce que je mange me procure du plaisir ».
Mais là s’arrête la comparaison avec les drogues telles que la cocaïne ou l’héroïne. En effet, celles-ci entraînent une libération plus importante de dopamine et court-circuitent le circuit normal de la récompense, censé s’autoréguler [1].
Avec le temps, la dépendance s’installe et les doses de dopamines nécessaires pour atteindre le plaisir (donc la dose et/ou la fréquence de drogues) augmentent. Ce n’est pas le cas pour un aliment sucré. Au fil du repas, le plaisir associé à la consommation d’aliments diminue au fur et à mesure que l’on se sent rassasié ; et la prise alimentaire s’interrompt lorsque l’on n’a plus faim : le système de la récompense se désactive naturellement [2].
Le sucre ne peut donc pas être comparé à une drogue.
D’après un groupe de spécialistes européens des addictions [4], il n'existe à ce jour aucune preuve qu'un aliment spécifique provoque une dépendance (à l'exception de la caféine et des boissons alcoolisées, via des mécanismes très spécifiques). Cependant, il arrive que certaines personnes développent des envies compulsives liées à une dépendance psychologique au fait même de manger.
La restriction mime l’addiction
Les régimes restrictifs, visant à perdre du poids, peuvent être à l’origine de ces envies irrésistibles de manger des produits « plaisir », souvent gras et sucrés. En effet, plus l’on se prive d’un aliment, plus il nous fait envie.
« Une des conséquences majeure et récurrente des privations et exclusions pratiquées, quel que soit le régime, est, paradoxalement, la reprise de poids, voire le surpoids : plus on fait de régimes, plus on favorise la reprise pondérale (effet yo-yo), a fortiori en l'absence d'activité physique. » [5]
Lorsque la personne « craque », la transgression de l’interdit se manifeste sur un mode compulsif suivi de sentiment de culpabilité voire d’angoisse. Il s’ensuit alors un comportement de super-contrôle et de restriction. C’est un cercle vicieux qui mime le processus de l’addiction.
Ces troubles du comportement alimentaires peuvent entraîner souffrance et problèmes de santé, qui nécessitent un accompagnement par des professionnels.
Lever les interdits et aller vers une consommation raisonnée en étant à l’écoute de ses sensations de faim et de satiété peut permettre de sortir de ces comportements compulsifs.
D’après les études, 5 à 10 % de la population générale seraient concernés par une addiction au fait de manger. Si vous pensez être concerné par ce type de comportements, n’hésitez pas à vous tourner vers un professionnel compétent.