Février 2023
Troubles de la fertilité, pilosité excessive, tendance à l’anxiété et à la dépression… Face aux symptômes de leur maladie, les femmes atteintes d’un syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) développeraient aussi des troubles du comportement alimentaire (TCA). Or, la prise en charge de ces troubles pourrait être l’une des pierres angulaires du succès du traitement de la maladie, selon une revue entreprise par des chercheurs polonais.
Les troubles du comportement alimentaire, au cœur de la maladie ?
Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) a été décrit pour la première fois en 1935. L’obésité qui touche beaucoup de femmes atteintes du SOPK est aujourd’hui considérée non pas comme un symptôme mais bien comme l’une des causes de la maladie, chez les femmes génétiquement prédisposées. Le traitement de l’obésité constitue ainsi l’une des options thérapeutiques en cas de SOPK. Les chercheurs estiment que pour être efficace, ce traitement doit prendre en compte certains comportements alimentaires problématiques, qui peuvent être en cause dans l’obésité, tels que l’alimentation émotionnelle (qui consiste à manger en réponse à ses émotions – négatives ou positives–, et non en réponse à des signaux de faim), le binge eating (épisodes d’hyperphagie incontrôlés), ou le syndrome dit d’alimentation nocturne (consommations alimentaires dans la soirée après le dîner, lors du coucher ou pendant la nuit en cas de réveil ou d’insomnie). Des troubles qui ont en commun une perturbation du système de récompense. Or, les symptômes du SOPK tels que la pilosité excessive ou les troubles de la fertilité seraient susceptibles de générer une anxiété ou des symptômes dépressifs perturbant le système de récompense, pouvant ainsi engendrer les troubles du comportement alimentaire évoqués. Selon ce cercle vicieux, l’obésité originelle pourrait alors se voir exacerbée (Figure).
Figure : Le cercle vicieux des troubles du comportement alimentaire en cas de syndrome des ovaires polykystiques (PCOS).
Alimentation émotionnelle, binge eating et alimentation nocturne chez les patientes
Pour étayer ce raisonnement, les chercheurs ont réalisé une revue de la littérature afin de documenter l’existence et la prévalence de tels troubles alimentaires chez les femmes atteintes de SOPK. À leur regret, seules quelques rares données sont disponibles. Ainsi, selon une étude, 30 à 50 % des femmes atteintes de SOPK seraient concernées par l’alimentation émotionnelle ; un chiffre non négligeable, donc, même s’il n’est pas comparé aux femmes non atteintes de SOPK. Les patientes SOPK obèses seraient aussi plus sujettes aux pulsions alimentaires que les patientes non obèses selon une autre étude. Les données disponibles sur le binge eating montrent parfois, mais pas toujours, un risque accru chez les patientes SOPK par rapport aux femmes non atteintes. La seule étude ayant aussi mesuré l’anxiété des patientes montre un risque plus important de binge eating chez les patientes SOPK les plus anxieuses. Enfin, plusieurs études concluent à un risque accru de dépression chez les patientes SOPK.
Des dérégulations hormonales qui perturbent le système de récompense
Pour les chercheurs, les émotions négatives et le stress chronique ressentis par les patientes pourraient activer l’axe dit HPA (pour Hypothalamic - Pituitary - Adrenal) et augmenter ainsi la sécrétion de cortisol, conduisant à une diminution de la dopamine et de la sérotonine. Les perturbations de ces neurotransmetteurs, impliqués dans le système de récompense et la régulation des humeurs, pourraient être compensées par des comportements alimentaires inadaptés tels que l’alimentation émotionnelle, le binge eating ou le syndrome d’alimentation nocturne.
Bien qu’ils regrettent la pauvreté des données actuellement disponibles, les chercheurs estiment que les relations entre obésité et troubles du comportement alimentaire (TCA) en cas de SOPK pourraient être bidirectionnelles : les TCA pourraient favoriser l’obésité et donc l’apparition d’un SOPK chez les femmes génétiquement prédisposées ; réciproquement, les symptômes du SOPK pourraient favoriser les troubles du comportement alimentaire et exacerber l’obésité et les symptômes du SOPK. Dans les deux cas, le dépistage et le traitement des TCA seraient particulièrement déterminants pour enrayer la maladie.
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