Manger en réponse à des émotions négatives, à des pulsions ou à l’inverse se restreindre devant son enfant peut-il influencer son comportement alimentaire ? Une étude publiée dans la revue Appetite a tenté de répondre à cette question en explorant l’impact à moyen terme de trois types de comportements alimentaires maternels – émotionnel, restreint, ou externe – sur celui des enfants.
Trois comportements alimentaires problématiques
L’étude a été réalisée en deux temps (T1 et T2) espacés de 10 mois d’intervalle, auprès de 822 couples mère-enfant polonais (452 couples mère-fille et 370 mère-fils ; mères de 23 à 59 ans, enfants de 5 à 12 ans). Le questionnaire DEBQ (Dutch Eating Behavior Questionnaire[1]) et sa version adaptée pour les enfants (DEBQ-C) ont été remplis à T1 et T2 et ont permis de classer les comportements alimentaires des mères et des enfants en trois catégories : (1) « émotionnel », désignant les prises alimentaire en réponse à des émotions négatives, (2) « restreint », qui correspond au fait de se restreindre pour perdre ou maintenir son poids ou (3) « externe », qui fait référence aux prises alimentaires en réponse à des stimuli externes comme la vue ou l’odeur d’aliments.
Des liens avérés qui dépendent du sexe
L’étude révèle que le comportement alimentaire des mères est corrélé à celui de leur enfant, mais ceci de façon différente selon qu’il s’agit d’une fille ou d’un fils (voir figure).
Dans les dyades mère-fille, des comportements alimentaires maternels à dominante « émotionnelle » ou « restreinte » (T1) prédisent, respectivement, un comportement alimentaire « émotionnel » ou « restreint » chez leur fille (T2). Aucune relation n’est en revanche observée entre la sensibilité de la mère aux stimuli externes et le comportement alimentaire de l’enfant.
Dans les dyades mère-fils, ce sont les comportements alimentaires maternels de style « émotionnel » ou « externe » (T1) qui prédisent, respectivement, une alimentation « émotionnelle » et une alimentation « externe » chez le fils (T2). La restriction maternelle n’est quant à elle associée à aucune dimension du comportement alimentaire de l’enfant.
Note : T1 = Temps 1, au départ ; T2 = temps 2, après 10 mois. Les lignes en gras représentent les coefficients de variation significatifs pour la dyade mère-fille, la dyade mère-fils ou les deux (p< 0,001)
Une transmission problématique en termes de santé future
Pour les auteurs, malgré le caractère exploratoire de l’étude, les résultats plaident en faveur d’une information des mères quant à l’impact de leur comportement alimentaire sur celui de leur enfant, voire sur leur indice de masse corporelle (d’après leurs résultats préliminaires). Leur santé future est en jeu car, d’une part, les habitudes alimentaires des enfants changent difficilement et, d’autre part, les comportements alimentaires de type « restreint », « émotionnel » ou « externe » sont souvent associés à des compulsions alimentaires et à un excès de poids.
[1] The Dutch Eating Behavior Questionnaire (DEBQ) for assessment of restrained, emotional, and external eating behavior. van Strien, T., Frijters, J. E. R., Bergers, G. P. A., & Defares, P. B. (1986). International Journal of Eating Disorders, 5(2), 295–315.