Cette revue française s’intéresse au trouble le mieux décrit des troubles de conduites alimentaires (TCA) chez les personnes obèses : le Binge eating disorder (BED), de « to binge », se goinfrer.
Il se caractérise par des épisodes récurrents d’accès hyperphagiques en l’absence de comportements compensatoires inappropriés (par ex. vomissements provoqués ou emploi abusif de laxatifs), contrairement à la boulimie.
La 5e édition du Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux (DSM-5) le reconnait désormais comme un trouble mental à part entière. Il se caractérise par trois facteurs clés :
- La consommation d’une grande quantité de nourriture, jugée comme excessive, dans « un temps limité ». Les auteurs notent que la quantité importe plus que la qualité, même si le sujet consomme préférentiellement des aliments appréciés.
- Un sentiment de perte de contrôle, jugé par les auteurs comme l’élément le plus important.
- Une fréquence des crises variable selon la sévérité du BED.
D’autres facteurs peuvent également être pris en compte telle qu’une détresse marquée ou une honte de soi-même ressentie après une crise.
La prévalence de ce trouble a été évaluée en Europe à 1,9 % chez les femmes et 0,3 % chez les hommes, contre 3,5 % des femmes et 2 % des hommes aux Etats-Unis.
Les auteurs décrivent plus largement la compulsion, comportement actif et sélectif, qui porte sur des aliments appréciés et répond à une envie de manger sans sensation de faim. Lorsque cette envie devient irrésistible, il s’agit alors d’une compulsion dite sévère pour laquelle l’individu « craque » ou lutte pour ne pas craquer.
Plusieurs chercheurs voient un continuum entre les compulsions alimentaires et le BED, en passant par des binge dits subjectifs (les quantités consommées n’étant pas forcément considérées comme anormales). Le sentiment de perte de contrôle est au centre de ces comportements.
On parle d’alimentation émotionnelle lorsque les émotions deviennent le facteur déclenchant de la prise alimentaire : le sujet mange en réponse à un « stress émotionnel » et la nourriture a alors un effet apaisant. Les compulsions, y compris le BED, sont ainsi vues comme un dysfonctionnement de la maîtrise de ses émotions.
Dans le BED, on retrouve deux composantes qui sont l’impulsivité et la compulsivité. Pour les auteurs, ces deux critères, en plus de la perte de contrôle, devraient permettre de considérer ce trouble comme une addiction comportementale, ce qui n’est pas encore le cas dans le DSM-5.
Des travaux de neuro-imagerie ont de plus montré que BED et addiction partagent des mécanismes communs, notamment un dysfonctionnement du système de la récompense. Les chercheurs notent aussi des symptômes d’accoutumance et de manque.
Les personnes atteintes de BED se trouvent bien souvent dans un état de fragilité psychique. Leur prise en charge doit inclure un accompagnement afin qu’elles trouvent d’autres manières de maîtriser et contrôler leurs émotions. Le BED, tout comme les addictions, nécessite un traitement spécifique, pendant lequel le risque de rechute doit être considéré.