Avril 2022
Relever des défis, se mesurer et se dépasser, conquérir des titres... Tout comme les sportifs, les pâtissiers ont le goût de la compétition. Le Championnat de France du Dessert, dont la finale 2022 vient de se clôturer, en offre un bon exemple. Mais au-delà des victoires individuelles, les titres et distinctions jouent un rôle fédérateur en contribuant au rayonnement de la pâtisserie et à la transmission d’une culture de l’excellence.
Le titre de Champion de France du Dessert est un des plus convoités dans l’univers de la pâtisserie. Pour les jeunes pâtissiers en formation, qui concourent dans la catégorie Juniors, il constitue un tremplin vers l’emploi, notamment au sein d’établissements prestigieux ou à l’international. Pour les professionnels, c’est une reconnaissance du talent personnel et du niveau d’excellence atteint dans l’exercice du métier. Le titre agit comme un véritable booster de notoriété, tant auprès de la profession que du grand public et des médias. Considéré comme une compétition de référence, le Championnat de France du Dessert n’est pas le seul challenge auquel les professionnels peuvent se mesurer. Et ils en sont friands.
Le président des jurys de la finale nationale du Championnat de France du Dessert, Angelo Musa, est bien placé pour le savoir... Chef pâtissier exécutif de l’Hôtel Plaza Athénée (Paris), Angelo Musa est en effet auréolé des titres prestigieux de « MOF Pâtissier Confiseur » (Un des Meilleurs Ouvriers de France) et de Champion du Monde de la Pâtisserie. « Chaque concours a ses différences et son rayonnement, mais ils ont en commun d’être des moteurs d’épanouissement, d’expression personnelle et de progression, évoque-t-il. Pour moi qui pratique le marathon en amateur, l’analogie avec le sport est évidente. La préparation intensive, la recherche de ses limites, voir de quoi on est capable et ne rien lâcher, l’adrénaline de la compétition, la résistance à la pression... Bref, c’est un truc de dingue ! »
Des compétitions internationales
La Coupe du Monde de la Pâtisserie – dont les vainqueurs reçoivent le titre de Champion du Monde de la Pâtisserie – a la particularité d’être une compétition par équipes. Constituées de trois professionnels (pâtissier, glacier, chocolatier), celles-ci sont issues de sélections nationales et représentent leur pays respectif. La finale a lieu tous les deux ans à Lyon, dans le cadre du salon Sirha. Les candidats se départagent autour de cinq épreuves artistiques et de dégustation.
Il existe d’autres grandes compétitions internationales, à l’image de la Coupe du Monde de la Glace artisanale, organisée en Italie et soutenue par la Confédération Nationale des Glaciers de France, ou encore du Mondial des Arts sucrés, qui se déroule à Paris dans le cadre du Salon du Chocolat et qui met à l’honneur la parité avec des équipes nationales composées d’un binôme mixte femme-homme.
Pour Angelo Musa, « qu’elles soient individuelles ou collectives, les compétitions sont aussi des étapes intéressantes pour celles et ceux qui veulent s’engager dans le concours MOF. C’est notamment le cas du Championnat de France du Dessert qui est un concours très complet, avec des jurys de travail et de dégustation, et dont le niveau d’exigence constitue une très bonne préparation. » De fait, pour les chefs pâtissiers comme dans toutes les catégories professionnelles couvertes par le concours, Un des Meilleurs Ouvriers de France est unanimement reconnu comme la distinction suprême*.
Un soutien aux filières de formation professionnelle
Le statut particulier du concours MOF ne tient pas uniquement à son prestige. En effet, son origine remonte à 1923 avec la création du Comité d’Organisation des Expositions du Travail dont le but était d’apporter une visibilité aux métiers sous tension en valorisant les savoir-faire de haut-niveau et en leur apportant une reconnaissance nationale.
« Cette initiative gouvernementale a donné naissance au concours Un des Meilleurs Ouvriers de France qui, au fil des promotions, engendre des ambassadeurs de la réussite par la voie professionnelle, aussi bien dans l’artisanat que dans l’industrie ou les services, explique Jean-Luc Chabanne, secrétaire général du Comité d’organisation (COET-MOF). Fondé sur un partenariat avec les branches professionnelles, le concours est placé sous l’égide des ministères en charge du Travail, de l’Agriculture, de l’Artisanat, de l’Économie et de l’Éducation nationale. Ainsi, au-delà de la dimension honorifique, "Un des Meilleurs Ouvriers de France" est avant tout un diplôme d’État, reconnu en tant que tel en France comme en Europe. »
L’implication institutionnelle est un trait que partage le Championnat de France du Dessert. Comme le rappelle Johanna Redon, responsable de la Communication événementielle et des partenariats de Cultures Sucres, « le concours a été créé en 1974 dans le cadre d’une collaboration entre l’interprofession sucrière, l’Éducation nationale et les acteurs de l’hôtellerie-restauration. L’idée était de promouvoir le dessert de restaurant, servi à l’assiette, à travers un concours distinguant les meilleurs pâtissiers dans deux catégories : les professionnels, mais aussi ceux en formation dans les établissements hôteliers. »
Le partenariat avec l’Éducation nationale s’est ensuite prolongé avec la mise en place, en 1997, de la Mention Complémentaire de Cuisinier en Desserts de Restaurant (MCCDR). Ce cursus de formation ouvert aux CAP, Bac Pro et BTS des métiers de l’alimentation et de l’hôtellerie fournit bon nombre de candidats Juniors du Championnat de France du Dessert. Enfin, il s’exprime aujourd’hui à travers la mobilisation des établissements hôteliers qui accueillent les finales régionales et la finale nationale du Championnat.
Des signes distinctifs soigneusement protégés
Dans les années 1980, Paul Bocuse fut parmi les premiers à faire de son titre de MOF un support de communication. Le Chef et ses équipiers diplômés en arboraient au quotidien les signes distinctifs, une médaille portée par une cravate/cordon bleu-blanc-rouge. Pour ne pas être gênés dans leur travail, ils serraient fortement la cravate autour du cou. Mais comme cela restait inconfortable, l’insigne a pris la forme du fameux col de veste tricolore qui est devenu le signe distinctif des MOF.
Chaque compétition offre un trophée et des insignes à ses vainqueurs. La veste officielle de Champion de France du Dessert a ainsi été créé en 2018, avec notamment le logo du Championnat et le drapeau bleu-blanc-rouge brodés sur le col. Les lauréats portent cette veste siglée tout au long de l’année, dans leurs restaurants comme dans leurs apparitions publiques (plateaux de télévision, réseaux sociaux, salons et événements...).
Comme le remarque Christophe Duhamel, directeur Commercial des vêtements professionnels Lafont, « la fabrication des vestes et le marquage par broderie ou sérigraphie sont réalisés dans nos ateliers dédiés, dans le respect scrupuleux de la charte d’identité fournie par l’organisateur du concours. En tant que partenaire du Championnat de France du Dessert, nous fournissons les vestes de travail des candidats et de leurs commis et, bien sûr, les vestes personnalisées des lauréats. Nous sommes également fournisseur officiel des MOF. Comme toute distinction, ces titres sont soigneusement protégés et seuls les titulaires légitimes peuvent les porter. Ainsi, lorsqu’un professionnel commande une veste MOF, nous devons contrôler son diplôme et vérifier son inscription dans la liste du COET-MOF. »
Transmettre la passion du métier, susciter des vocations
En marge des honneurs, la participation à une compétition de haut niveau permet aux professionnels de s’évaluer, de se situer dans leur parcours. C’est pourquoi, l’âge moyen des candidats se situe à 35 ans pour le concours MOF et 30 ans pour le Championnat de France du Dessert. Reste que tous les grands pâtissiers n’ont pas forcément l’envie ni la possibilité de s’engager dans des challenges qui demandent un profil et une mobilisation particuliers. Il existe néanmoins d’autres manières de se distinguer, notamment grâce aux trophées délivrés par les médias gastronomiques.
Par exemple, le magazine Le Chef distingue le Pâtissier de l’année, élu par des chefs étoilés. De son côté, le Guide Michelin propose chaque année une promotion Passion Dessert qui met en lumière une sélection de pâtissières et pâtissiers de talent, repérés par les inspecteurs du guide. Enfin, les Trophées du Gault & Millau sacrent également leur Pâtissier de l’année et le cercle des Grandes tables du monde distingue son Chef pâtissier de restaurant de l’année. Témoignant de la richesse et de l’effervescence de la haute pâtisserie, toutes ces initiatives contribuent à son rayonnement et, surtout, à encourager les vocations auprès des jeunes pâtissiers en devenir.
* Le concours Un des Meilleurs Ouvriers de France compte trois catégories dans l’univers du sucré : MOF Pâtissier Confiseur, MOF Chocolatier Confiseur, MOF Glacier.