Juillet 2024
Si l’attrait des rongeurs pour les solutions sucrées résulte largement de la saveur et de la valeur nutritive de ces solutions, des résultats expérimentaux suggèrent que l’olfaction serait également impliquée. Une équipe américaine a souhaité préciser comment l’odorat est susceptible d’impacter l’identification et la reconnaissance de différentes solutions sucrées chez la souris, à travers une série de trois expériences. Ils montrent que les souris testent plus volontiers et plus rapidement des solutions de glucose (Figure A), de fructose (Figure B) (et de saccharose après une période d’apprentissage, non représenté ici) par rapport à de l’eau (avant tout contact gustatif avec la solution, donc).
Or, ces résultats ne sont plus observés lorsque l’on induit (chimiquement) une perte d’odorat chez les animaux, suggérant l’implication de la fonction olfactive pour identifier la présence des sucres dans la solution. Par ailleurs, des souris « KO »[1] présentant des récepteurs gustatifs de la saveur sucrée non fonctionnels, développent après plusieurs jours une préférence plus importante pour la solution de glucose par rapport à la solution de fructose, ce qui n’est plus visible lorsque les souris sont rendues anosmiques. L’odorat intervient donc aussi pour discriminer les solutions sucrées entre elles au cours du processus d’ingestion. Quant à la préférence pour le glucose, elle se forme après une phase d’exposition de plusieurs jours à ces solutions, suggérant 1/ l’implication de signaux post-ingestifs liés à la détection intestinale du glucose et renforçant l’attrait pour ce nutriment ; et 2/ un apprentissage résultant d’interactions entre ce système de détection et le système olfactif.
Les chercheurs invitent ainsi à ne pas oublier la composante olfactive dans les modèles murins étudiant les effets des solutions sucrées et à explorer plus en profondeur la capacité d’autres mammifères (dont les humains) à percevoir les odeurs des différents sucres.
Figure : Nombre de fois où les souris viennent essayer les solutions sucrées (première ligne) et temps de latence avant le premier coup de langue (ligne du bas), pour le glucose (A) et le fructose (B), avant et après un traitement déclenchant la perte d’odorat [extrait de la figure 4 de l'article].
Les souris viennent plus volontiers et plus rapidement goûter des solutions de glucose et de fructose que l’eau quand leur odorat est fonctionnel
[1] Pour knocked out : souris qui ont été génétiquement modifiées pour inactiver un gène, ici celui codant pour la synthèse de la sous-unité T1R3 du récepteur gustatif T1R2+R3 de la saveur sucrée