Les aliments traditionnels locaux, alliés d’une alimentation saine ?
Les aliments traditionnels locaux, alliés
d’une alimentation saine ?
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mai 2023
Socle d’une alimentation équilibrée pour certains, trop caloriques et gras pour d’autres… la vision que nous avons des aliments traditionnels, ces produits typiques d’une région ou d’un pays, joue-t-elle un rôle dans l’adoption d’un régime sain ? C’est la question à laquelle des chercheurs ont voulu répondre à travers une étude réalisée dans différentes régions du monde, utilisant la théorie des comportements planifiés (TPB, pour Theory of planned behaviour en anglais).
Un cadre théorique pour identifier les déterminants de l’adoption d’un régime sain
Selon cette théorie, l’intention de mettre en place un comportement (ici l’adoption d’un régime sain) résulte de trois déterminants :
- 1/ l’attitude des individus vis-à-vis du comportement (ex : adopter un régime sain serait sage/bénéfique)
- 2/ les normes subjectives intégrées par l’individu (ex : mon entourage pense que je devrais adopter un régime sain)
- 3/ ses croyances sur les freins ou facteurs facilitant l’adoption du comportement (ex : adopter un régime sain demande du temps et de l’argent).
Les chercheurs ont ainsi interviewé près de 6 000 consommateurs (dont environ 60 % de femmes) de 10 pays (Brésil, Chine, Allemagne, Israël, Italie, Japon, Corée du Sud, Pologne, Espagne, Etats-Unis), recrutés devant des magasins d’alimentation, sur les trois déterminants de la TPB, sur leur perception des aliments traditionnels du pays/de la région ; sur leur intention d’adopter un régime sain.
La perception des aliments traditionnels, un facteur médiateur…
Les résultats viennent d’abord préciser les rôles respectifs des trois déterminants de la Théorie des comportements planifiés dans l’intention d’adopter un régime sain, et pointent le rôle prépondérant d’une attitude personnelle positive des individus vis-à-vis d’une alimentation saine, qui découle elle-même des croyances personnelles positives.
Les chercheurs montrent par ailleurs qu’une attitude positive vis-à-vis des aliments traditionnels (ex : je préfère/j’aime cuisiner les aliments traditionnels de mon pays/ma région) constitue un facteur médiateur entre les déterminants de la TPB et l’intention d’adopter un régime sain. D’où l’importance de prendre en compte ce facteur lorsque l’on souhaite encourager l’adoption de régimes favorables à la santé.
… qui dépend du pays considéré
En outre, toutes populations confondues, une attitude positive vis-à-vis des aliments traditionnels était positivement corrélée à l’intention d’adopter un régime sain. Toutefois, les analyses par pays révélaient de grandes disparités entre les populations : la corrélation s’avérait bien positive en Italie, Pologne, Espagne, au Japon et aux Etats-Unis, mais négative en Chine et au Brésil et non significative en Israël, Allemagne, et Corée du Sud. Ainsi, la perception « saine » des aliments traditionnels diffère selon les cultures des pays, possiblement du fait de la variabilité de la qualité nutritionnelle des aliments traditionnels selon les pays (ex : régime méditerranéen en Espagne ou Italie versus valorisation forte de la viande rouge au Brésil).
Un aiguillage pour les politiques de santé publique
Alors que les recommandations alimentaires reposent encore largement sur un discours d’ordre nutritionnel dans de nombreux pays, les chercheurs déduisent de leurs travaux plusieurs conséquences pour la santé publique. Les messages sanitaires devraient viser à renforcer les croyances et attitudes personnelles positives vis-à-vis d’une alimentation saine, par exemple en pointant ses divers effets favorables ((bien être, bien vieillir…). Par ailleurs, les politiques en faveur d’une alimentation saine devraient intégrer à la fois les attributs de santé et de tradition des aliments et prendre en considération la culture alimentaire spécifique à chaque pays. En pratique, les aliments traditionnels présentant les profils les plus sains devraient être encouragés en priorité afin d’augmenter leur appréciation et familiarité auprès des consommateurs. Les producteurs locaux ont tout leur rôle à jouer pour cela. Pour les opérateurs, un défi sera de concilier l’amélioration nutritionnelle de certains produits traditionnels sans compromettre leur authenticité culturelle.
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Selon une étude utilisant le cadre conceptuel de la théorie des comportements planifiés, la perception que nous avons des aliments traditionnels influence l’intention d’adopter un régime sain.
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Toutefois, la perception du potentiel « santé » des aliments traditionnels varie selon les pays.
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Cette perception mériterait d’être prise en compte dans la formulation des messages de santé publique.
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The theory of planned behaviour and healthy diet: Examining the mediating effect of traditional food. Sogari G, Pucci T, Caputo V, Van Loo EJ. Food Quality and Preference (2023), 104, [104709].
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