20 mai 2021
Importée sur le sol réunionnais au cours du XVIIIe siècle, la canne à sucre occupe aujourd’hui avec quelques 23 000 hectares cultivés, plus de la moitié de la surface agricole utile de l’île. Il est vrai que cette plante graminée originaire de Mélanésie, sorte de grand roseau robuste et particulièrement riche en saccharose, a trouvé sur place les conditions climatiques tropicales (chaleur et humidité) propices à son enracinement.
Voir également notre article sur la culture de la canne à sucre.
Une production conséquente
Une telle production de sucre de canne suppose, au niveau local, une politique économique et industrielle résolument orientée vers la production de sucre. Si la betterave sucrière occupait la même proportion des terres labourables en métropole, la France serait, en théorie, capable de fournir les deux tiers de la production mondiale en sucre !
De plus, la production de canne, appelée aussi "culture pivot" procure, par sa résistance aux cyclones, une garantie de revenus. La canne a servi de base à une diversification originale qui permet aux exploitants de compléter leur activité.
Un calendrier chargé
La campagne sucrière à la Réunion débute avec l’arrivée de la saison dite "fraîche", en l’occurrence début juillet. Celle-ci se poursuit pendant plus de vingt semaines jusqu’à la fin du mois de novembre sur près de 3 400 exploitations qui emploient quelques 10 500 personnes.
Relief tourmenté oblige, les champs de canne sont en effet, implantés sur la partie côtière de la Réunion, tel un collier végétal vert allant de 0 à 800 m d'altitude, perlé de rose lorsqu’arrive la floraison de juin. Cette particularité géographique explique notamment pourquoi deux techniques de récolte continuent de cohabiter sur le plan régional : la coupe traditionnelle à la main et la coupe mécanisée, qui ne peut être mise en œuvre que sur des parcelles suffisamment grandes et planes pour accueillir des machines, sortes de moissonneuse adaptées à ce type de récolte. A la machette ou à l’aide de moissonneuses, la canne à sucre est méthodiquement coupée, mais non arrachée, à la différence de la betterave.
La coupe s’effectue ainsi pendant quatre ou cinq années consécutives. Des cycles de six à sept ans sont également possibles avant que la baisse de rendement ne devienne trop importante. Les souches sont alors arrachées et de nouvelles boutures replantées, la canne se reproduisant en effet par bouturage de la tige.
Le trésor de saccharose
C’est précisément au cœur de cette tige, haute de trois à cinq mètres, que se trouve la précieuse réserve de saccharose. Lors de la récolte, après avoir été "dépaillée", c'est-à-dire débarrassée de ses feuilles, seule cette tige, sélectionnée au niveau de la taille, est conservée. Il lui faudra alors dix à douze mois pour repousser. Le "bout blanc" (le haut de la plante), pauvre en saccharose (il contient surtout des composés non sucrés ou des sucres réducteurs comme le glucose et le fructose), est également délaissé.
La coupe achevée, les cannes sont acheminées vers les sucreries de l’île. Ici, selon une technique dite de "pression-imbibition", la canne est broyée et mouillée quatre ou cinq fois d’affilée par des batteries de moulins. Le jus sucré ainsi obtenu est réchauffé, additionné de chaux, décanté et filtré avant l’étape finale de cristallisation.
Une activité saisonnière de grande ampleur
La culture de la canne joue, en outre, un rôle social de première importance, mobilisant une main d’œuvre conséquente et générant globalement 18 300 emplois directs, indirects et induits.
A partir de cette matière première, toute la filière s’est constituée pour valoriser les coproduits et compléter la production de sucre : les productions d’alcool (rhums, punchs) valorisent la mélasse, la bagasse brûlée par les deux centrales thermiques de l’île fournit 45 % de la consommation électrique. Enfin par leur importance, les surfaces cultivées en canne jouent un rôle décisif sur le plan environnemental, contribuant à protéger la terre contre l’érosion et à recycler le CO2.