Fruit de progrès techniques et agronomiques constants, la culture de la betterave en France est l'une des plus performantes au monde. Les efforts conjugués des chercheurs et des producteurs permettent le développement du rendement betteravier et d'améliorer la protection de l'environnement.
Trois facteurs se conjuguent pour expliquer cette performance : le climat, la sélection variétale et les techniques culturales. La culture de la betterave est très sensible à toute évolution. L’Institut Technique de la Betterave industrielle (ITB) a mis au point un "modèle de croissance", Previbet, qui permet de simuler la croissance journalière de la plante sur la base des données météorologiques.
Ce modèle a été appliqué des années 1990 à 2006, et les résultats font apparaître une corrélation évidente entre un climat plus chaud et humide au bon moment et un développement plus rapide de la plante. Globalement, sur l’ensemble de la période, le climat a été favorable et il a contribué à l’amélioration du rendement betteravier.
Des semences sur-mesure
Pour tirer le meilleur parti des conditions climatiques, des caractéristiques des sols et lutter contre les bio agresseurs, les variétés font l’objet d’un suivi précis. Chaque année, plus de trente variétés de betteraves sont suivies dans un réseau d’essais et classées selon un palmarès de performances.
Le travail de sélection permet de développer les plus adaptées à l’évolution du climat et des maladies et de proposer aux agriculteurs les futurs "best sellers". La durée de vie commerciale de chaque variété – de trois à cinq ans – est assez courte. Le développement des maladies et la volonté de limiter l’utilisation de fongicides conduisent, en effet, à mettre au point en permanence de nouvelles variétés.
Dans les années 80
Les efforts se sont particulièrement portés sur les plus tolérantes à la rhizomanie – l’un des principaux pathogènes de la betterave. Aujourd’hui, ils se concentrent sur les nématodes ou le rhizoctone brun… et sur la recherche d’un équilibre optimal entre productivité et développement durable.
Les méthodes de sélection restent classiques, tout en faisant appel à toutes les avancées en termes de marquage moléculaire et de génomique. La tendance est à l’augmentation de la diversité génétique : la mise au point de variétés résistantes à une maladie donnée et destinée à une zone géographique identifiée permet de créer des plantes qui seront capables de gérer plusieurs maladies à la fois.
Des techniques culturales toujours plus pointues
L’utilisation d’intrants a diminué de manière constante, grâce au meilleur raisonnement des utilisations et grâce à l’augmentation des rendements. Là où il y a trente ans, plus d’un kilo de substance active de produits de protection des plantes était utilisé pour produire une tonne de sucre, seulement 300 g suffisent aujourd’hui.
Les doses d’azote minéral par hectare ont chuté de 30 % ; les fertilisants phosphatés ou potassiques ont suivi la même tendance. L’utilisation d’insecticides a également été raisonnée. Quant à l’irrigation, celle-ci est restée stable malgré les épisodes de sécheresse, les surfaces qui bénéficient d’apports en eau ne représentant que 11 % de la surface totale.
Fertiliser naturellement la terre
Le recyclage d’engrais organiques est également de plus en plus pratiqué, qu’il s’agisse d’effluents provenant de l’élevage, de pailles issues de récoltes précédentes ou de résidus de la production de sucre et d’alcool (écumes, vinasses).
Tout est ensuite mis en œuvre pour que les semis puissent se développer dans les meilleures conditions. Depuis trois ans, la généralisation de l’activation des semences – technique de prégermination permettant d’activer la levée des graines – contribue à l’amélioration de l’installation de la culture et ainsi à l’augmentation des rendements.
Des outils stratégiques
Parallèlement, plusieurs outils permettent d’ajuster efficacement les intrants à chaque parcelle et même d’évaluer les rendements. Un déficit en azote peut avoir des répercussions négatives sur le rendement betteravier, mais à l’inverse un excès réduit la teneur en sucre et la qualité de la racine.
La maîtrise de cette fertilisation est donc une donnée stratégique. Pour doser au plus juste les apports azotés, les producteurs réalisent des prélèvements de sol pour l’analyse : sur la base des résultats et des paramètres agronomiques de la parcelle l’outil informatique "Azofert", développé par l’Inra établit une dose conseillée d’engrais à apporter. L’ITB a de son côté développé "Fertibet", qui apporte une aide à la décision pour raisonner la fertilisation en phosphate et potasse.
Enfin, pour apporter la bonne quantité d’eau au bon moment au bon endroit, un outil d’aide à la décision a été créé en 2003 par ITB : "Irribet". L’agriculteur télécharge le logiciel via internet. Il le renseigne en indiquant les caractéristiques du sol de sa parcelle et la date du semis puis les données de la station météo la plus proche. Compte tenu du bilan hydrique calculé en fonction des réserves existantes en eau au moment des semis, des précipitations enregistrées depuis et de l’évaporation, le logiciel lui indique une recommandation d’irrigation.
Associant performance naturelle et capacité à évoluer, la betterave sucrière est, de surcroît, aujourd’hui cultivée par des agriculteurs maîtrisant des techniques et des équipements de pointe, à l’image de la géolocalisation et de la télédétection par satellite, ou encore de l’informatique embarquée. Ces nouvelles technologies, de plus en plus utilisées, permettent aux planteurs de suivre l’état de leurs parcelles avec une précision de l’ordre de 2 cm !
Une aide précieuse pour conduire leur exploitation avec efficacité et dans le respect de l’environnement. Et contribuer, au final, à faire de la filière betterave-sucre française l’une des plus performantes au monde.