Expressions populaires :
le sucre ne fait pas dans la langue
de bois !

Expressions populaires : le sucre ne fait pas dans la langue de bois !

Novembre 2022

Faut-il être tout miel ou, au contraire, casser du sucre sur le dos pour obtenir une part de gâteau, se refaire la cerise ou se fendre la poire ? Les expressions forgées autour du sucre et du sucré peuvent soulever bien des interrogations. À défaut de réponses formelles, on en recherchera l’origine qui, parfois, nous laisse baba.

Le dessert c’est du gâteau

« La vie, c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. » C’est à Forrest Gump, personnage du film éponyme de Robert Zemekis, que l’on doit cette sentence existentielle. Derrière l’allusion à la douceur du chocolat, elle peut tout autant inspirer une vision inquiète ou optimiste de ce que l’avenir nous réserve. Dans un sens, on peut se dire que « la vie c’est pas de la tarte », dans l’autre que « c’est du gâteau ». Peut-on en conclure que le sens de la vie repose tout entier dans ces deux desserts ? Rien ne permet de l’affirmer, mais il est certain que le langage a fait ce choix gourmand pour exprimer la notion de simplicité, d’absence d’obstacle. Même les Anglais sont d’accord : ce qui est simple est a piece of cake (un morceau de gâteau).

Le sucré ramène sa fraise

Il est vrai que le sucre et, plus largement, les aliments sucrés ont tendance à ramener leur fraise dans les expressions idiomatiques de la langue française. Noblesse oblige. La fraise étant le large col de dentelle que portaient les artistocrates au tournant du 16e siècle, ramener sa fraise est une manière de s’imposer dans une conversation en se haussant du col.

Dans une version plus populaire, le mot fraise désigne le visage en argot. Visage que l’importun approche donc sans y être convié. Rien à voir avec le fait de sucrer les fraises, qui utilise le geste mécanique et saccadé du saupoudrage pour évoquer les tremblements incontrôlables liés au grand âge ou à des atteintes neurologiques. À défaut d’un diagnostic médical, cette image est devenue l’expression familière d’une issue fatale.

À l’inverse, une personne en bonne santé pourra se targuer d’avoir la pêche, de tenir la dragée haute à la maladie ou encore, pour les plus sportifs, d’avoir des tablettes de chocolat. Dans le troisième cas, l’analogie entre des rangées de carrés de chocolat et des muscles abdominaux bien dessinés est évidente. Les deux précédents sont plus symboliques. L’hommage à la pêche peut venir, soit de l’antiquité chinoise, où ce fruit était un symbole d’immortalité, soit de l’univers de la boxe, où la pêche désigne un coup de poing redoutable, signe de vitalité (on parle aussi de « patate »).

Quant à la dragée haute, il s’agit d’un jeu de l’ancien temps, consistant à brandir au-dessus des enfants une confiserie attachée à un fil de canne à pêche pour les faire bondir… et patienter avant d’obtenir la récompense attendue. Cette manière de manifester son pouvoir en ménageant une attente s’exerçait aussi aux dépends des chevaux devant lesquels on suspendait une botte de fourrage également appelée « dragée ».

Le sucre a bon dos !

En matière d’expressions, il faut aussi se méfier des faux amis. Par exemple, pleurer comme une madeleine ne doit rien au gâteau fétiche de Marcel Proust, mais à Marie-Madeleine qui pleurait abondamment en confessant ses péchés à Jésus Christ. De même, être baba n’invoque pas le gâteau au rhum : c’est une onomatopée issue du Latin batare qui signifie « bouche bée ». Enfin, l’expression ce n’est pas du flan, qui garantit la robustesse d’un objet ou d’une affirmation, n’a rien à voir avec le dessert moelleux mais avec le métal dont était faite la fausse monnaie. Le « flan » désigne donc ce qui est factice.

Parmi les faux amis, il y a aussi ceux qui cherchent à vous casser du sucre sur le dos. L’origine de cette image est incertaine. Elle viendrait de l’époque où l’on devait débiter les pains de sucre pour obtenir des morceaux, tâche solitaire et fastidieuse, et où « casser le morceau » était synonyme de dénonciation assortie d’une intention de nuire. L’amalgame se serait cristallisé autour du sucre qui, on le sait, a le dos large et n’est pas toujours à l’abri des mauvaises intentions.

Il est vrai que les expressions péjoratives autour du sucre ne manquent pas, mais on ignore pourquoi le verbe sucrer a pris le deuxième sens de supprimer (sucrer le permis de conduire) et pourquoi la forme pronominale se sucrer signifie s’octroyer quelque chose au détriment de quelqu’un… Par contre, on sait que « donner de la confiture aux cochons » vient d’une sentence du Christ : « ne donnez pas vos perles aux porcs », disait-il pour inviter à ne pas dilapider la parole sacrée. L’imaginaire populaire n’a pas attendu la fin de l’abondance pour remplacer les perles par un bien plus modeste mais tout aussi précieux.

La douceur porte ses fruits

Heureusement, le langage sait également être doux et bienveillant à l’égard des plaisirs sucrés. Les expressions « être tout sucre » ou « tout miel » coulent de source. On retrouve d’ailleurs cette idée au Moyen-Orient où on dit que le thé non sucré est « amer comme la mort » ; légèrement sucré, il est « doux comme la vie » ; fortement sucré, il est « bon comme l'amour ». De manière plus contemporaine mais tout aussi affectueuse, il s’écrit volontiers sur les réseaux sociaux qu’un personnage public considéré comme mignon et sympathique est « un sucre » !

On notera également que les fruits sont beaucoup mis à contribution. Par analogie : on a la banane quand on esquisse un sourire, on attrape le melon quand on a la grosse tête. Par dérision : les caricatures du roi Louis-Philippe avec une tête en forme de poire ont tellement fait rire qu’on leur doit encore aujourd’hui de « se fendre la poire ». Par consolation : après une « période de guigne » (malchance, maladie), on est bien content de se refaire la cerise. Et c’est précisément ce merveilleux fruit rouge et sucré qui se taille la plus belle part du gâteau avec l’expression la cerise sur le gâteau. Mieux que tout autre, elle incarne la touche de perfection, le détail qui enrichit une création comme les images enrichissent notre langue.

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