Octobre 2022
Une ambiance relaxante favorise-t-elle une alimentation saine ?
Quand on parle d’alimentation réconfortante, on peut penser à du chocolat ou des crèmes glacées, mais les plats chauds ne sont pas en reste : pâtes, soupes, pizzas, etc. comme le témoigne le #comfortfood largement utilisé sur Instagram. Contrairement aux perceptions communes, le côté réconfortant de l’alimentation ne peut pas être catégorisé comme nutritionnellement sain ou non. Par ailleurs, de récents travaux montrent qu’une ambiance relaxante oriente les choix vers des aliments « sains » en comparaison à une situation stressante, bruyante.
Ainsi, dans une étude 100 % virtuelle, des chercheurs ont voulu savoir si l’environnement de consommation (relaxant vs bruyant) pouvait impacter les envies et la consommation alimentaire notamment pour les aliments dits « réconfortants ».
L’imaginaire de l’alimentation réconfortante
Pour cela, les chercheurs ont d’abord identifié les situations associées à la consommation d’aliments réconfortants dans l’esprit des consommateurs. Selon leur étude préliminaire, l’alimentation réconfortante était décrite comme ayant principalement lieu à domicile, plutôt en fin de journée / à la tombée de la nuit, dans des vêtements et une position confortables (canapé…), avec un fond de musique ou de télévision.
Dans l’étude principale, les chercheurs ont ensuite réparti 399 adultes britanniques (28,3 ans en moyenne, 200 femmes) en 4 groupes exposés à des environnements audio-visuels reflétant ou non l’environnement imaginaire associé à l’alimentation réconfortante, en croisant deux facteurs d’exposition (Figure 1) :
- Musique relaxante versus stimulante,
- Image évoquant une soirée relaxante au domicile (canapé, plaid, lumière tamisée…) versus un déjeuner en terrasse, entouré de monde (voir figure 1).
Figure 1 : Croisement des deux facteurs d’exposition dans les 4 groupes expérimentaux
Après avoir été exposés à la musique (relaxante versus stimulante) et à l’image (domicile versus extérieur), les participants devaient composer – virtuellement sur ordinateur – un plat de pâtes à partir d’un pool de 16 ingrédients (brocoli, mozzarella, crème, salami…) ; les plats de pâtes tels que les « macaronis au fromage » et les « spaghettis aux boulettes de viande » ayant été fréquemment identifiés comme des aliments réconfortants.
Des situations qui stimulent l’envie, mais pas la consommation
Résultats ? L’exposition à une musique relaxante et/ou à un environnement domestique augmentaient l’envie déclarée pour des aliments réconfortants en général (voir Figure 2) ; de même, le plaisir attendu de tels aliments était plus élevé dans ces conditions (par rapport à la situation combinant musique stressante et déjeuner à l’extérieur).
Toutefois, l’exposition aux différentes ambiances n’allait pas jusqu’à influencer les teneurs caloriques des plats de pâtes virtuellement composés par les participants, qui étaient similaires quels que soient la musique et l’environnement suggéré (Figure 2).
Pour les chercheurs, ce résultat remet en question l’idée et les résultats antérieurs selon lesquels des ambiances détendues favoriseraient systématiquement des choix alimentaires plus sains.
Un mécanisme indépendant de l’alimentation émotionnelle ?
Alors que l’envie pour les aliments réconfortants était influencée à la fois par la musique et par l’environnement de consommation suggéré, seule la musique induisait une amélioration de l’état émotionnel [1] global chez les participants. Pour les auteurs, cela pourrait suggérer que le fait de manger pour se réconforter est un comportement affectif spécifique qui n’est pas uniquement motivé par des mécanismes émotionnels (se démaquant ainsi de l’alimentation émotionnelle).
Des résultats à exploiter en pratique clinique
Ces résultats sont parmi les premiers à investiguer les effets de l’environnement ambiant sur les envies, le plaisir escompté et les consommations potentielles d’aliments réconfortants. Ils pourraient guider les restaurateurs et les magasins d’alimentation afin de faire coïncider l’ambiance de leurs établissements avec les différents types de produits proposés. De même, ils pourraient permettre d’augmenter l’envie et le plaisir alimentaire dans certains contextes cliniques, en particulier dans les hôpitaux dans le cadre de stratégies d’accroissement des apports alimentaires des patients (dénutrition, troubles du comportement alimentaire…).
[1] calculé à partir de 5 émotions positives et 9 émotions négatives