Effets variables des allégations : à la recherche des facteurs explicatifs
Effets variables
des allégations :
à la recherche des facteurs explicatifs
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Novembre 2022
Tantôt incitatives, tantôt dissuasives… les allégations nutritionnelles et de santé produisent des effets variables sur l’appréciation et les intentions d’achat de produits alimentaires selon les études. Mais à quoi tiennent ces différences ? Des chercheurs espagnols publient dans Food Quality and Preference une revue systématique des facteurs possiblement en cause.
Trois catégories de facteurs étudiés
La première étape de leur travail a consisté à classer les différents types de facteurs d’influence des comportements d’achats alimentaires, précédemment identifiés dans deux modèles théoriques. Ils ont ainsi formalisé trois grandes catégories de facteurs pouvant expliquer la variabilité des effets des allégations sur les préférences et choix de produits (Figure) :
- Les facteurs relevant des caractéristiques des consommateurs (facteurs personnels, contextuels et environnementaux) ;
- Les facteurs relevant des caractéristiques des produits ;
- Les facteurs relevant des processus internes de traitement des informations par les consommateurs (les points déterminants du comportement d’achat).

Familiarité, connaissances nutritionnelles et motivation santé
Parmi les premiers, on peut d’abord retenir l’effet du degré de familiarité des consommateurs non seulement avec les allégations elles-mêmes, mais aussi avec les produits. Ainsi, plusieurs études ont révélé des préférences accrues pour les produits présentant des allégations relatives à des nutriments familiers tels que le calcium ou la vitamine C, par rapport à des produits avec des allégations plus inhabituelles, par exemple sur les β-glucanes. Les allégations reçoivent en outre une appréciation plus favorable quand elles sont apposées sur des produits « typiques » sur lesquels il est habituel de voir figurer de telles mentions : yaourts, céréales ou biscuits de petit-déjeuner, margarine, fromage…
Les connaissances nutritionnelles font aussi partie des caractéristiques des consommateurs impactant le jugement des produits avec allégation. Si l’on considère les connaissances subjectives des consommateurs (c’est-à-dire ce qu’ils pensent connaître en matière de nutrition), celles-ci semblent généralement favoriser les achats et les consommations de produits avec allégations. Les choses sont un peu plus nuancées lorsque l’on considère les connaissances nutritionnelles objectives (c’est-à-dire celles qui sont effectivement correctes lorsqu’on les évalue, via des questionnaires par exemple). Certaines études montrent que les consommateurs présentant un niveau de connaissances objectives plus élevé jugent généralement plus sains les produits présentant des allégations (sauf pour certains produits comme les barres chocolatées), tandis que d’autres ne montrent pas d’influence du niveau de connaissances nutritionnelles.
Enfin, si les facteurs tels que l’âge, le sexe ou le niveau d’éducation présentent des effets variables sur l’appréciation et l’achat de produits avec des allégations, il semble que les consommateurs qui s’estiment en mauvaise santé témoignent d’un intérêt plus important pour ces produits, révélant l’importance de la motivation à préserver sa santé en tant que facteur individuel.
Le goût avant tout pour les produits plaisir
En termes de caractéristiques de produits, les auteurs s’arrêtent sur une dimension essentielle : celle du goût des produits. En effet, les allégations mettant en avant des reformulations nutritionnelles (ex : réduit en sucre, gras, sel) semblent parfois laisser entendre aux consommateurs une diminution des qualités gustatives du produits et donc du plaisir à le consommer. Ce qui expliquerait que les produits « plaisir » portant ce type d’allégation (ex : fromages réduits en sel…) soient moins appréciés des consommateurs. Pour les auteurs, les consommateurs ne sont donc pas totalement prêts à faire fi du goût au profit de leur santé. Par conséquent, ils ne se tournent vers des produits plus sains que si le goût est préservé, voire amélioré.
Des perceptions modifiées des produits dans leur globalité
Si les allégations tendent à renforcer la perception du caractère sain des produits, cela est d’autant plus vrai que les ingrédients faisant l’objet d’une allégation sont perçus comme « naturels » ou inhérents au produit : les yaourts enrichis en calcium sont ainsi plus plébiscités que ceux enrichis en fer ou en antioxydants. En outre, une allégation portant sur un ingrédient peut s’étendre à l’ensemble du produit dans l’esprit du consommateur : cet « effet de halo », souvent décrit dans la littérature, peut ainsi conduire à surestimer le caractère sain d’un produit. Un effet qui peut venir s’ajouter à un autre effet, contreproductif, des allégations : celles-ci peuvent en effet parfois conduire à une augmentation des portions consommées, comme cela a été décrit dans une étude observant les consommations de M&M’s présentés comme « à faible teneur en matières grasses ». La propension des allégations à modifier la perception et l’usage des produits au-delà des seules mentions qu’elles évoquent posent ainsi la question de leur véritable compréhension par les consommateurs.
Quoi qu’il en soit, les chercheurs appellent des études menées dans des conditions plus représentatives des situations de sélection et d’achats de la vie réelle, la plupart des études analysées dans leur revue ayant été réalisées dans des contextes artificiels sujets à des biais (biais de déclarations…).
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Des chercheurs passent en revue trois catégories de facteurs à même d’expliquer la variabilité des effets des allégations sur les préférences et les comportements d’achats de produits : 1/les caractéristiques des sujets, 2/les caractéristiques des produits et 3/les processus internes de traitement des informations par les consommateurs.
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Parmi ces facteurs, on peut retenir les rôles de la familiarité vis-à-vis des produits et des allégations, du niveau de connaissances nutritionnelles, de la motivation à préserver sa santé ou encore de la façon personnelle d’interpréter les allégations.
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Tackling nutritional and health claims to disentangle their effects on consumer food choices and behaviour: A systematic review. Ballco P, Gracia A. Food Quality and Preference, Volume 101, 2022, 104634.
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