Janvier 2024
Notre perception sensorielle influence nos comportements et nos préférences alimentaires. Certaines personnes ont un traitement sensoriel atypique (hypo ou hypersensibilité) dans un ou plusieurs domaines : on parle alors de réactivité sensorielle. Des chercheurs ont exploré l’association entre la réactivité sensorielle et les troubles alimentaires chez 589 enfants espagnols âgés de 3 à 7 ans inclus dans l’étude transversale InProS (Enfance et Traitement Sensoriel).
Une réactivité sensorielle et une sélectivité alimentaire fréquentes
D’après un questionnaire – le Short Sensory Profile – complété par les parents, 29 % des enfants présentaient une réactivité sensorielle, notamment relative à la sensibilité tactile (11 % ), gustative et olfactive (15 %), visuelle et auditive (25 %), et au filtrage auditif [1] (44 %).
Quant aux troubles de l’alimentation, évalués par les parents par deux questions fermées, 18 % des enfants consommaient une variété limitée d'aliments, de goûts ou de textures (sélectivité), 5 % avaient des problèmes de transition et/ou d'introduction des textures, et 4 % étaient concernés par les deux problèmes.
La réactivité sensorielle associée aux troubles de l’alimentation
Les enfants présentant une réactivité sensorielle avaient une probabilité plus grande de sélectivité alimentaire (+ 13 %). Plus particulièrement, les enfants hypo ou hypersensibles au niveau du goût et de l'odorat étaient plus susceptibles de présenter des troubles de la sélectivité alimentaire (+ 42 %), de texture (+ 17 %) ou les deux (+ 31 %). Par ailleurs, les enfants présentant une réactivité sensorielle auditive étaient plus susceptibles d'avoir des problèmes de sélectivité alimentaire (+ 8 %).
Selon les auteurs, manger est une expérience multi-sensorielle qui implique le traitement et l'intégration des caractéristiques visuelles, auditives, tactiles, gustatives et olfactives des aliments. Ainsi, les enfants qui réagissent de manière excessive ou insuffisante à un ou plusieurs stimuli sensoriels peuvent être réticents à certains aliments, en particulier aux aliments nouveaux dont les caractéristiques sensorielles ne leur sont pas familières.
Ces résultats, concordants avec la littérature, soulignent l’importance de considérer la réactivité sensorielle – en particulier gustative ou olfactive – comme un prédicteur potentiel de troubles alimentaires. Si cette étude d’observation ne permet pas de démontrer le lien de causalité, elle invite à tester des interventions précoces par des professionnels de l'ergothérapie pour détecter et éventuellement atténuer l'impact de la réactivité sensorielle sur les comportements alimentaires.
[1] Capacité à filtrer l’information sensorielle auditive (ex : la personne est perturbée par un environnement bruyant, ou semble ne pas entendre quand on lui parle)